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MADINA


Pivot : «.....ce que j’ai vu à Alger est incomparable !»

Publié par blednet sur 3 Janvier 2010, 15:14pm

Catégories : #Événement Sportifs

Pivot : «J’ai vécu France 98, mais ce que j’ai vu à Alger est incomparable !»

Entretien réalisé par Farid Aït Saâda



Pour avoir été le seul à filmer les images de l’agression dont ont été victimes des joueurs de la sélection algérienne à leur arrivée au Caire, Guillaume Pivot a contribué à «internationaliser» l’affaire, à tel point que ses images ont fait le tour du monde entier et ont jeté le discrédit sur l’Egypte. Depuis, le reporter de Canal+ est devenu le plus algérien des journalistes français ! Mercredi soir, il sera l’invité de l’émission Les Spécialistes Maghreb sur Canal+ (visible pour les abonnés algériens sur le satellite Arabsat) qui sera consacrée à la sélection algérienne. Il y évoquera son périple pour suivre la sélection algérienne au Caire et à Khartoum. Il nous parle de cette grande aventure humaine avec les Verts.

Avant d’être venu en Algérie au mois d’octobre dernier pour couvrir le match Algérie-Rwanda, avez-vous couvert des activités de la sélection algérienne auparavant ?
Non, jamais. En fait, je n’étais venu que trois fois en Algérie avant cela. La première fois, c’était à l’occasion de la venue de Zinédine Zidane en Algérie, en 2006 ; la deuxième fois, c’était en 2008 pour effectuer un reportage sur le derby MCA-USMA pour le compte de Canal+ ; la troisième fois, c’était la même année pour assister à la cérémonie de remise du Ballon d’Or algérien. Donc, le match face au Rwanda a constitué une découverte pour moi.

Justement, à l’occasion de ce match-là, vous aviez réalisé un reportage de l’intérieur du stage, ce qui a accrédité l’idée que Canal+ a eu des facilités de la part de la FAF…
Ce n’est pas vrai ! Nous n’avons pas été privilégiés pour le match Algérie-Rwanda. Nous avons introduit une demande pour effectuer un long reportage en étant avec l’équipe, mais cela nous a été refusé. La seule chose qui nous a été accordée a été de travailler avec les jours lors d’un après-midi où les chaînes de télévision étrangères avaient été admises à l’hôtel militaires. Je me rappelle que, ce jour-là, il y avait avec nous une équipe de Canal+ et une autre d’une chaîne de télévision arabe. M. Raouraoua avait aussi accepté de me laisser filmer quelques images du dîner. C’est là que je suis monté rapidement dans les chambres pour prendre quelques images des joueurs dans leurs salles de bain. Voilà tout.

Qu’en est-il des images montrant les joueurs en train de suivre le match Zambie-Egypte ?
Ce n’est pas moi qui les ai prises. J’avais remis une petite caméra à Yazid Mansouri et lui ai demandé de prendre quelques images pour moi. C’est ce qu’il a fait, mais il a arrêté de filmer après le but inscrit par les Egyptiens. Je le répète : il n’y a jamais eu de privilèges. Beaucoup de choses ont été dites sur cette question, comme par exemple que Canal+ a donné de l’argent pour pouvoir être au cœur des Verts. C’est complètement faux. La preuve : nous avions introduit une demande auprès de M. Raouraoua pour faire un reportage de l’intérieur avant le match Egypte-Algérie, mais cela nous a été refusé. Si nous avions réellement des entrées au sein de la sélection algérienne, nous aurions été présents à Coverciano. Or, cela n’a pas été le cas.

Donc, c’est vraiment après l’incident de l’agression contre le bus de la sélection algérienne au Caire que tout a changé pour vous ?

Absolument. Et encore, c’était grâce à un concours de circonstances. J’étais  aux abords de l’aéroport du Caire à attendre l’arrivée de la délégation algérienne, en compagnie des journalistes algériens –vous y étiez là d’ailleurs-. Mon but était de recueillir des déclarations de joueurs à leur arrivée. Puis, il y a eu la tentative d’agression de supporters égyptiens contre les journalistes et supporters algériens. J’ai tout de suite flairé le guet-apens. Alors, discrètement, j’ai rejoint la voiture qui était juste derrière les supporters égyptiens, alors que ces derniers encerclaient les journalistes et supporters algériens. Lorsque le bus algérien est sorti de l’aéroport, j’ai demandé à mon chauffeur de suivre le cortège. C’est ainsi que j’ai pu filmer les projectiles que les supporters égyptiens présents à l’entrée de l’aéroport avaient lancés sur le bus.

Vous avez donc pu vous introduire dans l’hôtel avec le cortège ?
Non, cela ne s’est pas passé comme ça. Le chauffeur n’a pas pu suivre la cadence du cortège, si bien que lorsque nous sommes arrivés à proximité de l’hôtel, le bus avait déjà franchi la grille d’entrée. J’ai alors demandé au chauffeur de s’arrêter sur le bord de la route, je suis descendu et j’ai couru vers la grille. Franchement, je n’avais pas grand espoir qu’on me laisse entrer, mais j’ai pu m’introduire, profitant de la confusion qui régnait. J’ai couru vers l’entrée de la réception et c’est là où j’ai vu le bus avec des vitres brisées et des joueurs avec du sang. J’ai alors tout filmé.

Vous avez filmé des images qui ont fait le tour du monde…Ce n’est qu’après les avoir envoyées par Internet que j’en ai pris conscience. Déjà, des Egyptiens présents à l’hôtel étaient venus vers moi et avaient l’air de m’interroger, mais je ne comprenais pas l’arabe. Heureusement, un collègue de Dzfoot, Mehdi, était présent et, ayant compris le manège, avait crié : «Ce sont les moukhabarate (services de renseignement égyptiens, ndlr) ! Ils veulent confisquer les images !» M. Raouraoua a alors accouru et, ayant compris lui aussi, a pris ma caméra et  l’a emmenée en lieu sûr. Quelques minutes plus tard, j’ai envoyé les images à Canal+ à partir de l’hôtel. Comme il régnait une grande agitation à l’hôtel, M. Raouraoua m’a proposé de passer la nuit à l’étage réservé à la délégation algérienne.

Finalement, vous êtes resté deux nuits de plus, soit toute la durée du séjour de la délégation algérienne au Caire…

C’est à ma demande car j’ai senti que ma vie était en danger. D’ailleurs, vous me l’aviez vous-même confirmé (instruits par des collègues égyptiens, nous l’avions informé qu’il était recherché par des Egyptiens excités, ndlr). M. Raouraoua a accepté et c’est ainsi que je suis resté avec la délégation. On m’a donné un survêtement algérien à titre de «camouflage». Cela dit, je n’avais pas une marge de manœuvre illimitée. Lorsqu’il y avait des réunions, on me priait gentiment de sortir.

En vous retrouvant ainsi, presqu’à votre corps défendant, impliqué dans la vie des Verts, votre mission professionnelle n’a-t-elle pas pris la dimension d’une véritable aventure humaine ?

Si, c’était une vraie aventure humaine. J’ai connu des gens formidables, que ce soit les joueurs ou les membres du staff. Je me suis senti solidaire de ce groupe car il a été victime d’une grave injustice. Je travaille dans le football tous les jours, que ce soit en France ou à l’étranger, pour le compte d’un bouquet de télévision dont l’une des vocations est le football, mais je n’ai jamais vu de ma vie des joueurs, de surcroît représentant une sélection nationale, être délibérément agressés avant un match. Cela m’a mis en sympathie avec eux. D’ailleurs, je me suis retrouvé à supporter les Algériens durant le match du Caire et j’étais effondré lorsque les Egyptiens avaient inscrit le deuxième but.

En rentrant le lendemain à Paris, vous avez quand même tenu à repartir à Khartoum. Est-ce par souci de terminer votre mission professionnelle, puisque le qualifié n’était pas encore désigné, ou bien pour poursuivre l’aventure humaine avec le groupe de joueurs ?

Les deux. Déjà, de nature, j’aime terminer un travail que j’ai commencé. Un problème se posait pour moi : l’ambassade du Soudan à Paris a refusé de m’octroyer un visa au motif que j’avais sur mon passeport un visa d’Israël que je m’étais fait délivrer à l’occasion d’un match de Coupe d’Europe que j’étais parti couvrir. Les autorités soudanaises sont à cheval sur ce genre de détail.

Vous avez donc dû refaire un autre passeport ?

Exactement. Canal+ avait préparé le visa pour un autre collègue, mais souhaitait que ce soit moi qui y aille puisque j’avais des affinités avec les joueurs et les membres du staff. J’ai donc fait un parcours de combattant pour me faire délivrer un nouveau passeport en express. J’ai pu faire le nécessaire à temps et je suis parti à Khartoum. La suite, vous la connaissez.

Vous qui avez côtoyé le groupe, avez-vous perçu une force intérieure en lui ?
Ah, oui ! Cette force était nettement perceptible. J’ai rarement vu une telle volonté et une telle solidarité. C’est comme si les joueurs disaient : «Qu’ils fassent ce qu’ils veulent, mais c’est nous qui allons passer.» J’ai découvert des joueurs formidables, tant sportivement qu’humainement.

Y a-t-il une image forte qui vous a marqué de ces quelques jours passés avec la sélection d’Algérie ?

Oui, celle de Halliche. Il a participé au match du Caire avec une arcade ouverte et un poignet fissuré, a sorti un match énorme, a été contraint de sortir à cause de crampes, a rejoint le vestiaire porté par deux bonhommes et, quatre jours plus tard, est reparti au combat à Khartoum en jouant tout le match contre l’Egypte. C’est la preuve d’un courage et d’une détermination inouïs, en plus de ses grandes qualités humaines et de son talent sportif.

Et lors du défilé à Alger ?

C’est celle d’un supporter qui s’était approché du bus et s’est mis à l’embrasser sans se lasser. C’est une image forte qui figure dans le reportage que j’ai réalisé.

Impressionné donc par la liesse qui a suivi la qualification ?

Très impressionné. J’ai vécu la nuit de la victoire de la France en Coupe du monde en 1998, mais ce que j’ai vu à Alger est puissance 10 ! C’était incomparable !

En France en général et à Canal+ en particulier, parle-t-on désormais davantage du football algérien ?

Oui, c’est clair. Les Français se sentent un peu concernés puisqu’il y a une forte communauté algérienne et il y a beaucoup de joueurs algériens nés et formés en France. On peut dire que l’Algérie est la deuxième sélection de cœur chez les Français.

Vous avez interrompu vos vacances d’hiver lundi passé pour vivre une journée avec les Verts au Castellet. Doit-on comprendre que vous êtes devenu Monsieur Algérie à Canal+ ?
Disons que, vu que j’ai suivi la sélection ces derniers mois, j’étais le plus indiqué pour poursuivre le travail. Cela dit, cela m’a fait plaisir de revoir les joueurs et les membres du staff.

Nous avons remarqué que Ghezzal a été particulièrement ravi de vous revoir et qu’il vous a donné une chaude accolade. Est-ce parce qu’il est de Lyon, tout comme vous ?
Il n’y a pas que lui à être de Lyon. Même Khaled Lemmouchia est lyonnais. C’est juste qu’il y a une amitié qui s’est liée. A la fin du match de Khartoum, Ghezzal est venu me congratuler sur le terrain et m’a dit qu’il avait mis son maillot de côté pour me l’offrir. Effectivement, une fois rentrés à l’hôtel, il me l’a remis.

Des projets avec la sélection algérienne, surtout que la CAN et le Mondial approchent ?
J’espère être accrédité en Angola pour couvrir la CAN. Par ailleurs, nous comptons proposer un projet de couverture des activités de la sélection algérienne de l’intérieur. Je vais en parler à M. Raouraoua. Je ne sais pas si ce sera accepté.
Entretien réalisé par Farid Aït Saâda



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