Ce que l’immigration nous rapporte
Capital.fr
18,4 milliards de taxes sur la consommation. De la main-d’œuvre dans les métiers délaissés. Des milliers de start-up
Pour 80% des Français issus de l’immigration, l’intégration fonctionne», affirme Hakim El Karoui, banquier d’affaires chez Rothschild et Cie et fondateur du Club XXIe siècle, où se côtoient 500 chefs d’entreprise, cadres, avocats, médecins ou hauts fonctionnaires d’origine étrangère. Car, derrière cette élite, «des centaines de milliers de consultants, directeurs de magasin, commerciaux et ingénieurs s’en tirent par le haut, renchérit Soumia Malinbaum, directrice du développement de la société informatique Keyrus et présidente de l’Association française des managers de la diversité (AFMD). Et bien entendu ils consomment, voyagent, paient des impôts…» Revue de détail de ces plus pour l’économie.
Nathalie Villard, avec Séverine Bourdon.
Business ethnique
Nestlé, L’Oréal et les autres ciblent les Noirs et les musulmans
Le marché des produits halal pèse 6 milliards d’euros et progresse de 10% par an, selon l’institut Xerfi. Depuis 2007, Nestlé, leader mondial du créneau, a créé une quarantaine de produits Maggi et Herta destinés aux musulmans. Fleury Michon, Labeyrie ou Pierre Martinet lui ont emboîté le pas. « L’acheteur type est jeune, de classe moyenne et friand de marques, car ces produits sont 10 à 20% plus chers », souligne-t-on chez Casino, créateur en 2009 de la première MDD halal, Wassila. Même euphorie dans les cosmétiques. La Sofres estime que 900 000 femmes noires de plus de 18 ans vivent en France. Et, selon les géants de la beauté, elles dépensent en moyenne cinq fois plus en maquillage (et six fois plus en produits capillaires) que les autres ! L’an dernier, L’Oréal a dégainé sa gamme Mixa pour peaux foncées, et recruté l’ex-Miss France Sonia Rolland pour ses pubs. La ligne représente déjà 10% du chiffre d’affaires de la marque.
Consommation
Le pouvoir d’achat des nouvelles classes moyennes dope l’économie
Selon le calcul de l’économiste Xavier Chojnicki pour Capital, les ménages immigrés ont versé, en 2005, près de 18,5 milliards d’euros de taxes sur la consommation. Une part supérieure à leur poids démographique, ce qui montre que, en dépit d’une forte proportion de familles pauvres, une bonne part de cette population s’embourgeoise. Pas mesuré à l’échelle du pays, ce phénomène saute aux yeux dans les quartiers prisés par ces nouveaux riches, où il booste l’économie locale. Comme à Bussy-Saint-Georges, dans la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, où plus d’un tiers des 20 000 habitants sont d’origine asiatique. L’association du bouddhisme khmer y côtoie l’Amicale thakhekienne du Laos culturel, le conservatoire enseigne le pipa et le guzheng, mais on n’est pas à Chinatown. «Une maison et un jardin», voilà le «rêve» qui a attiré Julie Tran, une Cambodgienne arrivée dans les années 1980 après avoir fui les Khmers rouges et les camps de réfugiés. En 2002, avec son mari, commercial dans une société informatique, et leurs deux enfants, elle a quitté La Courneuve pour un pavillon de 155 mètres carrés où un large écran plat trône face à un superbe canapé cuir. La clientèle asiatique représente ainsi 20 à 30% du chiffre d’affaires des agents immobiliers de Bussy. « Ce sont surtout des cadres de banque, des informaticiens et des ingénieurs, qui ont quitté Lognes, Torcy ou Noisiel parce qu’ils aiment les maisons neuves, majoritaires à Bussy », explique un professionnel. Depuis le milieu des années 1990, l’afflux a transformé la ville, trois fois plus peuplée et dotée d’un parc d’entreprises riche en activités high-tech. Mais gare à ce que les nouveaux venus ne repartent pas : «Si possible, nous irons vers Magny-le-Hongre», annonce en effet Julie Tran. Parce que les maisons sont plus grandes et les jardins plus verts…